vendredi soirm4 jqnvier(1882)
j'aurais bien fait de te quitter avant-hier soir à la porte de chez toi,je n'aurais pas eu cette discussion qui aurait du t'etre indifférente au moins, et qui m'a pourtant valu un si foid adieu. Car je ne puis l'attribuer, cet adieu glacé, qu'à la conversation qui venait de s'engager.Nous étions si bien d'accord une heure auparavant! Que ne t'ai-je quittée alors! Je serais rentré le coeur content, et maintenant encore mille pensées amères ne se meleraient pas au plaisire de t'écrire. Il me semble que je n'ai rien dit dans cette discussion qui ait pu te mécontenter.Mes paroles n'étaient certainement pas des paroles de médisance ou d'envie, et je ne comprends pas comment je t'ai déplu en prenant la défence du seul homme en France qui mérite l'enthousiasme. Si jamais j'étais destiné à parcourir une carrière illustre, après ton approbation, ma bien-aimée Adèle, l'admiration des esprits neufs et des ames jeunes serait, ce me semble, la plus belle récompense. Laissons cela.
Il est pourtant vrai de dire que j'ai rarement le bonheur de te voir de mon avis. Quelque opinion que j'avance, si je trouve devant toi des contradicteurs(et il est bizarre que cela ne m'arrive guère que devant toi), tu es bien plus prompte à te ranger de leur coté que du mien.Il semble qu'il suffit qu'une vérité pqsse pqr ma bouche pour etre une erreur à tes yeux.Je n'adopte jamais une opinions qu'après m'etre demandé si elle est noble et généreuse, c'est-à-dire digne d'un homme qui t'aime. Eh bien, que j'emette cette opinion, qu'elle blesse les idées de quelque qutre personne présente, qu'elle soit combattue, je cherche alors naturellement à m'assurer de ton aprobation, la seule que j'ambitionne et qui me satisfasse.C'est en vain! Tes regards deviennent mécontents, ton front souvieux, tes paroles brèves.Quelquefois mele tu m'imposes silence.Alors il faut me taire comme un éventé qui recule devant ses propres discours, ou, sije continue, me retirer décourgaé de t'avoir déplu en soutenant des idées que je croyais dignes de toi et qui cependant, selon toutes les apparences, se sont trouvées contraires aux tiennes.
je crois, mon amie, que tout ce que je te dis ici est simple et naturel.Eh bien, rien ne me répond que tu ne vois pas de l'orgueil.Et d'abord, j'aurais de l'orgueil que ce serait ta faute. Ne m'as-tu pas permis de me croire aimé de toi? Cependant, chère maie, un orgueil étroit et mesquin n'entrera jamais dans une ame qui a l'audance de t'aimer.Mes prétentions sont bien plus hautes que les preétentions de l'orgueil.Mes prétentions sont de te rendre heureuse, pleinement heureuse, d'associer mon esprit terrestre et ténébreux à ton esprit céleste et lumineux, mon ame à ton ame, mon sort à ton sort, mon immortalité à ton immortalité;et prends tout cela pour de la poésie si tu veux, car la poésie, c'est l'amour.Et qu'y a-t-il de réel au monde, si ce n'est pas la poésie?