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听法语故事: 美丽朋友  第三章

时间:2011-06-09 18:26:57 来源:可可法语 编辑:lydie310  测测英语水平如何

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Bel-Ami  美丽朋友
Guy de Maupassant  莫泊桑
Publication: 1885

Première partie第一部分
Chapitre 3
QuandGeorgesDuroy se retrouva dans la rue, il hésita
sur ce qu’il ferait. Il avait envie de courir, de rêver,
d’aller devant lui en songeant à l’avenir et en respirant
l’air doux de la nuit ; mais la pensée de la série
d’articles demandés par le pèreWalter le poursuivait,
et il se décida à rentrer tout de suite pour se mettre au
travail.
Il revint à grands pas, gagna le boulevard extérieur,
et le suivit jusqu’à la rue Boursault qu’il habitait.
Sa maison, haute de six étages, était peuplée
par vingt petits ménages ouvriers et bourgeois, et il
éprouva en montant l’escalier, dont il éclairait avec
des allumettes-bougies les marches sales où traî-
naient des bouts de papiers, des bouts de cigarettes,
des épluchures de cuisine, une écoeurante sensation
de dégoût et une hâte de sortir de là, de loger comme
les hommes riches, en des demeures propres, avec
des tapis. Une odeur lourde de nourriture, de fosse
d’aisances et d’humanité, une odeur stagnante de
crasse et de vieille muraille, qu’aucun courant d’air
n’eût pu chasser de ce logis, l’emplissait du haut en
bas.
La chambre du jeune homme, au cinquième étage,
donnait, comme sur un abîme profond, sur l’immense
tranchée du chemin de fer de l’Ouest, juste
au-dessus de la sortie du tunnel, près de la gare des
Batignolles. Duroy ouvrit sa fenêtre et s’accouda sur
l’appui de fer rouillé.
Au-dessous de lui, dans le fond du trou sombre,
trois signaux rouges immobiles avaient l’air de gros
yeux de bête ; et plus loin on en voyait d’autres, et
encore d’autres, encore plus loin. A tout instant des
coups de sifflet prolongés ou courts passaient dans
la nuit, les uns proches, les autres à peine perceptibles,
venus de là-bas, du côté d’Asnières. Ils avaient
desmodulations comme des appels de voix.Un d’eux
se rapprochait, poussant toujours son cri plaintif qui
grandissait de seconde en seconde, et bientôt une
grosse lumière jaune apparut, courant avec un grand
bruit ; et Duroy regarda le long chapelet des wagons
s’engouffrer sous le tunnel.
Puis il se dit : " Allons, au travail !" Il posa sa lumière
sur sa table ; mais au moment de se mettre à écrire, il
s’aperçut qu’il n’avait chez lui qu’un cahier de papier
à lettres.
Tant pis, il l’utiliserait en ouvrant la feuille dans
toute sa grandeur. Il trempa sa plume dans l’encre et
écrivit en tête, de sa plus belle écriture :
Souvenirs d’un chasseur d’Afrique.
Puis il chercha le commencement de la première
phrase.
Il restait le front dans sa main, les yeux fixés sur le
carré blanc déployé devant lui.
Qu’allait-il dire ? Il ne trouvait plus rien maintenant
de ce qu’il avait raconté tout à l’heure, pas une anecdote,
pas un fait, rien. Tout à coup il pensa : "Il faut
que je débute par mon départ. " Et il écrivit : "C’était
en 1874, aux environs du 15 mai, alors que la France
épuisée se reposait après les catastrophes de l’année
terrible..."
Et il s’arrêta net, ne sachant comment amener ce
qui suivrait, son embarquement, son voyage, ses premières
émotions.
Après dix minutes de réflexions il se décida à remettre
au lendemain la page préparatoire du début,
et à faire tout de suite une description d’Alger.
Et il traça sur son papier : "Alger est une ville toute
blanche... " sans parvenir à énoncer autre chose. Il
revoyait en souvenir la jolie cité claire, dégringolant,
comme une cascade de maisons plates, du haut de sa
montagne dans la mer, mais il ne trouvait plus un mot
pour exprimer ce qu’il avait vu, ce qu’il avait senti.
Après un grand effort, il ajouta : "Elle est habitée
en partie par des Arabes..." Puis il jeta sa plume sur la
table et se leva.
Sur son petit lit de fer, où la place de son corps avait
fait un creux, il aperçut ses habits de tous les jours
jetés là, vides, fatigués, flasques, vilains comme des
hardes de la Morgue. Et, sur une chaise de paille, son
chapeau de soie, son unique chapeau, semblait ouvert
pour recevoir l’aumône.
Sesmurs, tendus d’un papier gris à bouquets bleus,
avaient autant de taches que de fleurs, des taches anciennes,
suspectes, dont on n’aurait pu dire la nature,
bêtes écrasées ou gouttes d’huile, bouts de doigts
graissés de pommade ou écume de la cuvette projetée
pendant les lavages. Cela sentait la misère honteuse,
la misère en garni de Paris. Et une exaspération
le souleva contre la pauvreté de sa vie. Il se dit qu’il
fallait sortir de là, tout de suite, qu’il fallait en finir dès
le lendemain avec cette existence besogneuse.
Une ardeur de travail l’ayant soudain ressaisi, il se
rassit devant sa table, et recommença à chercher des
phrases pour bien raconter la physionomie étrange
et charmante d’Alger, cette antichambre de l’Afrique
mystérieuse et profonde, l’Afrique des Arabes vagabonds
et des nègres inconnus, l’Afrique inexplorée et
tentante, dont on nous montre parfois, dans les jardins
publics, les bêtes invraisemblables qui semblent
créées pour des contes de fées, les autruches, ces
poules extravagantes, les gazelles, ces chèvres di-
vines, les girafes surprenantes et grotesques, les chameaux
graves, les hippopotames monstrueux, les rhinocéros
informes, et les gorilles, ces frères effrayants
de l’homme.
Il sentait vaguement des pensées lui venir ; il les aurait
dites, peut-être, mais il ne les pouvait point formuler
avec des mots écrits. Et son impuissance l’enfiévrant,
il se leva de nouveau, les mains humides de
sueur et le sang battant aux tempes.
Et ses yeux étant tombés sur la note de sa blanchisseuse,
montée, le soir même, par le concierge, il
fut saisi brusquement par un désespoir éperdu. Toute
sa joie disparut en une seconde avec sa confiance en
lui et sa foi dans l’avenir. C’était fini ; tout était fini, il
ne ferait rien ; il ne serait rien ; il se sentait vide, incapable,
inutile, condamné.
Et il retourna s’accouder à la fenêtre, juste au moment
où un train sortait du tunnel avec un bruit subit
et violent. Il s’en allait là-bas, à travers les champs et
les plaines, vers la mer. Et le souvenir de ses parents
entra au coeur de Duroy.
Il allait passer près d’eux, ce convoi, à quelques
lieues seulement de leur maison. Il la revit, la petite
maison, au haut de la côte, dominant Rouen et l’immense
vallée de la Seine, à l’entrée du village de Canteleu.
Son père et sa mère tenaient un petit cabaret, une
guinguette où les bourgeois des faubourgs venaient
déjeuner le dimanche : A la Belle-Vue. Ils avaient
voulu faire de leur fils un monsieur et l’avaient mis
au collège. Ses études finies et son baccalauréat manqué,
il était parti pour le service avec l’intention de
devenir officier, colonel, général. Mais dégoûté de
l’état militaire bien avant d’avoir fini ses cinq années,
il avait rêvé de faire fortune à Paris.
Il y était venu, son temps expiré,malgré les prières
du père et de la mère, qui, leur songe envolé, voulaient
le garder maintenant. A son tour, il espérait un
avenir ; il entrevoyait le triomphe au moyen d’événements
encore confus dans son esprit, qu’il saurait assurément
faire naître et seconder.
Il avait eu au régiment des succès de garnison, des
bonnes fortunes faciles et même des aventures dans
un monde plus élevé, ayant séduit la fille d’un per-
cepteur, qui voulait tout quitter pour le suivre, et la
femme d’un avoué, qui avait tenté de se noyer par
désespoir d’être délaissée.
Ses camarades disaient de lui : "C’est un malin,
c’est un roublard, c’est un débrouillard qui saura se
tirer d’affaire." Et il s’était promis en effet d’être un
malin, un roublard et un débrouillard.
Sa conscience native de Normand, frottée par la
pratique quotidienne de l’existence de garnison, distendue
par les exemples de maraudages en Afrique,
de bénefs illicites, de supercheries suspectes, fouettée
aussi par les idées d’honneur qui ont cours
dans l’armée, par les bravades militaires, les sentiments
patriotiques, les histoires magnanimes racontées
entre sous-offs et par la gloriole du métier, était
devenue une sorte de boîte à triple fond où l’on trouvait
de tout.
Mais le désir d’arriver y régnait enmaître.
Il s’était remis, sans s’en apercevoir, à rêvasser,
comme il faisait chaque soir. Il imaginait une aventure
d’amour magnifique qui l’amenait, d’un seul
coup, à la réalisation de son espérance. Il épousait
la fille d’un banquier ou d’un grand seigneur rencontrée
dans la rue et conquise à première vue,
Le sifflet strident d’une locomotive qui, sortie toute
seule du tunnel, comme un gros lapin de son terrier,
et courant à toute vapeur sur les rails, filait vers le garage
des machines, où elle allait se reposer, le réveilla
de son songe.
Alors, ressaisi par l’espoir confus et joyeux qui hantait
toujours son esprit, il jeta, à tout hasard, un baiser
dans la nuit, un baiser d’amour vers l’image de
la femme attendue, un baiser de désir vers la fortune
convoitée. puis il ferma sa fenêtre et commença à se
dévêtir en murmurant :
"Bah, je serai mieux disposé demain matin. Je n’ai
pas l’esprit libre ce soir. Et puis, j’ai peut-être aussi
un peu trop bu. On ne travaille pas bien dans ces
conditions-là."
Il se mit au lit, souffla la lumière, et s’endormit
presque aussitôt.
Il se réveilla de bonne heure, comme on s’éveille
aux jours d’espérance vive ou de souci, et, sautant du
lit, il alla ouvrir sa fenêtre pour avaler une bonne tasse
d’air frais, comme il disait.
Les maisons de la rue de Rome, en face, de l’autre
côté du large fossé du chemin de fer, éclatantes dans
la lumière du soleil levant, semblaient peintes avec
de la clarté blanche. Sur la droite, au loin, on apercevait
les coteaux d’Argenteuil, les hauteurs de Sannois
et les moulins d’Orgemont dans une brume bleuâtre
et légère, semblable à un petit voile flottant et transparent
qui aurait été jeté sur l’horizon.
Duroy demeura quelques minutes à regarder la
campagne lointaine, et ilmurmura : "Il ferait bougrement
bon, là-bas, un jour comme ça. " Puis il songea
qu’il lui fallait travailler, et tout de suite, et aussi envoyer,
moyennant dix sous, le fils de sa concierge dire
à son bureau qu’il était malade.
Il s’assit devant sa table, trempa sa plume dans
l’encrier, prit son front dans sa main et chercha des
idées. Ce fut en vain. Rien ne venait.
Il ne se découragea pas cependant. Il pensa : "Bah,
je n’en ai pas l’habitude. C’est un métier à apprendre
comme tous les métiers. Il faut qu’on m’aide les premières
fois. Je vais trouver Forestier, qui me mettra
mon article sur pied en dix minutes."
Et il s’habilla. Quand il fut dans la rue, il jugea qu’il
était encore trop tôt pour se présenter chez son ami
qui devait dormir tard. Il se promena donc, tout doucement,
sous les arbres du boulevard extérieur.
Il n’était pas encore neuf heures, et il gagna le parc
Monceau tout frais de l’humidité des arrosages.
S’étant assis sur un banc, il se remit à rêver. Un
jeune homme allait et venait devant lui, très élégant,
attendant une femme sans doute.
Elle parut, voilée, le pied rapide, et, ayant pris son
bras, après une courte poignée de main, ils s’éloignèrent.
Un tumultueux besoin d’amour entra au coeur de
Duroy, un besoin d’amours distinguées, parfumées,
délicates. Il se leva et se remit en route en songeant à
Forestier. Avait-il de la chance, celui-là !
Il arriva devant sa porte au moment où son ami
sortait.
"Te voilà ! à cette heure-ci ! que me voulais-tu ?"
Duroy, troublé de le rencontrer ainsi comme il s’en
allait, balbutia :
"C’est que... c’est que... je ne peux pas arriver à faire
mon article, tu sais, l’article que M. Walter m’a demandé
sur l’Algérie. Ça n’est pas bien étonnant, étant
donné que je n’ai jamais écrit. Il faut de la pratique
pour ça comme pour tout. Je m’y ferai bien vite, j’en
suis sûr, mais, pour débuter, je ne sais pas comment
m’y prendre. J’ai bien les idées, je les ai toutes, et je ne
parviens pas à les exprimer,"
Il s’arrêta, hésitant un peu. Forestier souriait avec
malice :
"Je connais ça."
Duroy reprit :
"Oui, ça doit arriver à tout le monde en commençant.
Eh bien, je venais... je venais te demander un
coup de main... En dix minutes tu me mettrais ça
sur pied, toi, tu me montrerais la tournure qu’il faut
prendre. Tu me donnerais là une bonne leçon de
style, et sans toi, je nem’en tirerais pas."
L’autre souriait toujours d’un air gai. Il tapa sur le
bras de son ancien camarade et lui dit :
"Va-t’en trouver ma femme, elle t’arrangera ton
affaire aussi bien que moi. Je l’ai dressée à cette
besogne-là. Moi, je n’ai pas le temps ce matin, sans
quoi je l’aurais fait bien volontiers."
Duroy, intimidé soudain, hésitait, n’osait point :
"Mais à cette heure-ci, je ne peux pasme présenter
devant elle ?...
Si, parfaitement. Elle est levée. Tu la trouveras dans
mon cabinet de travail, en train de mettre en ordre
des notes pour moi."
L’autre refusait de monter.
"Non... ça n’est pas possible..."
Forestier le prit par les épaules, le fit pivoter sur ses
talons, et le poussant vers l’escalier :
"Mais, va donc, grand serin, quand je te dis d’y
aller. Tu ne va pas me forcer à regrimper mes trois
étages pour te présenter et expliquer ton cas."
Alors Duroy se décida :
"Merci, j’y vais. Je lui dirai que tu m’as forcé, absolument
forcé à venir la trouver.
- Oui. Elle ne te mangera pas, sois tranquille. Surtout,
n’oublie pas tantôt trois heures.
- Oh ! ne crains rien."
Et Forestier s’en alla de son air pressé, tandis que
Duroy se mit à monter lentement, marche à marche,
cherchant ce qu’il allait dire et inquiet de l’accueil
qu’il recevrait.
Le domestique vint lui ouvrir. Il avait un tablier
bleu et tenait un balai dans ses mains.
"Monsieur est sorti", dit-il, sans attendre la question.
Duroy insista :
"Demandez à Mme Forestier si elle peut me recevoir,
et prévenez-la que je viens de la part de son
mari, que j’ai rencontré dans la rue."
Puis il attendit. L’homme revint, ouvrit une porte à
droite, et annonça :
"Madame attend monsieur."
Elle était assise sur un fauteuil de bureau, dans une
petite pièce dont les murs se trouvaient entièrement
cachés par des livres bien rangés sur des planches
de bois noir. Les reliures de tons différents, rouges,
jaunes, vertes, violettes, et bleues, mettaient de la
couleur et de la gaieté dans cet alignement monotone
de volumes.
Elle se retourna, souriant toujours, enveloppée
d’un peignoir blanc garni de dentelle ; et elle tendit
sa main, montrant son bras nu dans la manche largement
ouverte.
"Déjà ?" dit-elle ; puis elle reprit : "Ce n’est point un
reproche, c’est une simple question."
Il balbutia :
"Oh ! madame, je ne voulais pas monter ; mais
votre mari, que j’ai rencontré en bas, m’y a forcé.
Je suis tellement confus que je n’ose pas dire ce qui
m’amène."
Elle montrait un siège :
"Asseyez-vous et parlez."
Elle maniait entre deux doigts une plume d’oie en
la tournant agilement ; et, devant elle, une grande
page de papier demeurait écrite à moitié, interrompue
à l’arrivée du jeune homme.
Elle avait l’air chez elle devant cette table de travail,
à l’aise comme dans son salon, occupée à sa besogne
ordinaire. Un parfum léger s’envolait du peignoir, le
parfum frais de la toilette récente. Et Duroy cherchait
à deviner, croyait voir le corps jeune et clair, gras
et chaud, doucement enveloppé dans l’étoffe moelleuse.
Elle reprit, comme il ne parlait pas :
"Eh bien, dites, qu’est-ce que c’est ?"
Il murmura, en hésitant :
"Voilà...mais vraiment... je n’ose pas... C’est que j’ai
travaillé hier soir très tard... et ce matin... très tôt...
pour faire cet article sur l’Algérie que M. Walter m’a
demandé... et je n’arrive à rien de bon... j’ai déchiré
tous mes essais... Je n’ai pas l’habitude de ce travaillà,
moi ; et je venais demander à Forestier de m’aider...
pour une fois..."
Elle l’interrompit, en riant de tout son coeur, heureuse,
joyeuse et flattée :
"Et il vous a dit de venir me trouver ?... C’est gentil
ça...
- Oui, madame. Il m’a dit que vous me tireriez
d’embarras mieux que lui... Mais, moi, je n’osais pas,
je, ne voulais pas. Vous comprenez ?"
Elle se leva :
"Ça va être charmant de collaborer comme ça. Je
suis ravie de votre idée. Tenez, asseyez-vous à ma
place, car on connaîtmonécriture au journal. Et nous
allons vous tourner un article, mais là, un article à
succès."
Il s’assit, prit une plume, étala devant lui une feuille
de papier et attendit.
Mme Forestier, restée debout, le regardait faire ses
préparatifs ; puis elle atteignit une cigarette sur la
cheminée et l’alluma :
"Je ne puis pas travailler sans fumer, dit-elle.
Voyons, qu’allez-vous raconter ?"
Il leva la tête vers elle avec étonnement.
"Mais je ne sais pas, moi, puisque je suis venu vous
trouver pour ça. "
Elle reprit :
"Oui, je vous arrangerai la chose. Je ferai la sauce,
mais il me faut le plat. "
Il demeurait embarrassé ; enfin il prononça avec
hésitation :
"Je voudrais raconter mon voyage depuis le commencement..."
Alors elle s’assit, en face de lui, de l’autre côté de la
grande table, et le regardant dans les yeux :
"Eh bien, racontez-le-moi d’abord, pour moi toute
seule, vous entendez, bien doucement, sans rien oublier,
et je choisirai ce qu’il faut prendre."
Mais comme il ne savait par où commencer, elle
se mit à l’interroger comme aurait fait un prêtre au
confessionnal, posant des questions précises qui lui
rappelaient des détails oubliés, des personnages rencontrés,
des figures seulement aperçues.
Quand elle l’eut contraint à parler ainsi pendant un
petit quart d’heure, elle l’interrompit tout à coup :
"Maintenant, nous allons commencer. D’abord,
nous supposons que vous adressez à un ami vos impressions,
ce qui vous permet de dire un tas de bêtises,
de faire des remarques de toute espèce, d’être
naturel et drôle, si nous pouvons. Commencez :
"Mon cher Henry, tu veux savoir ce que c’est que
l’Algérie, tu le sauras. Je vais t’envoyer, n’ayant rien
à faire dans la petite case de boue sèche qui me sert
d’habitation, une sorte de journal de ma vie, jour par
jour, heure par heure. Ce sera un peu vif quelquefois,
tant pis, tu n’es pas obligé de le montrer aux dames
de ta connaissance..."
Elle s’interrompit pour rallumer sa cigarette
éteinte, et, aussitôt, le petit grincement criard de la
plume d’oie sur le papier s’arrêta.
"Nous continuons, dit-elle.
"L’Algérie est un grand pays français sur la frontière
des grands pays inconnus qu’on appelle le désert, le
Sahara, l’Afrique centrale, etc., etc.
"Alger est la porte, la porte blanche et charmante
de cet étrange continent.
"Mais d’abord il faut y aller, ce qui n’est pas rose
pour tout le monde. Je suis, tu le sais, un excellent
écuyer, puisque je dresse les chevaux du colonel,
mais on peut être bon cavalier et mauvais marin.
C’est mon cas.
"Te rappelles-tu le major Simbretas, que nous appelions
le docteur Ipéca ? Quand nous nous jugions
mûrs pour vingt-quatre heures d’infirmerie, pays
béni, nous passions à la visite.
"Il était assis sur sa chaise, avec ses grosses cuisses
ouvertes dans son pantalon rouge, les mains sur ses
genoux, les bras formant pont, le coude en l’air, et il
roulait ses gros yeux de loto en mordillant sa moustache
blanche.
"Tu te rappelles sa prescription :
"Ce soldat est atteint d’un dérangement d’estomac.
Administrez-lui le vomitif n° 3 selon ma formule,
puis douze heures de repos ; il ira bien."
"Il était souverain, ce vomitif, souverain et irrésistible.
On l’avalait donc, puisqu’il le fallait. Puis, quand
on avait passé par la formule du docteur Ipéca, on
jouissait de douze heures de repos bien gagné.
"Eh bien, mon cher, pour atteindre l’Afrique, il faut
subir, pendant quarante heures, une autre sorte de
vomitif irrésistible, selon la formule de la Compagnie
Transatlantique."
Elle se frottait les mains, tout à fait heureuse de son
idée.
Elle se leva et se mit à marcher, après avoir allumé
une autre cigarette, et elle dictait, en soufflant des filets
de fumée qui sortaient d’abord tout droit d’un
petit trou rond au milieu de ses lèvres serrées, puis
s’élargissant, s’évaporaient en laissant par places,
dans l’air, des lignes grises, une sorte de brume transparente,
une buée pareille à des fils d’araignée. Par-
fois, d’un coup de sa main ouverte, elle effaçait ces
traces légères et plus persistantes ; parfois aussi elle
les coupait d’un mouvement tranchant de l’index et
regardait ensuite, avec une attention grave, les deux
tronçons d’imperceptible vapeur disparaître lentement.
Et Duroy, les yeux levés, suivait tous ses gestes,
toutes ses attitudes, tous les mouvements de son
corps et de son visage occupés à ce jeu vague qui ne
prenait point sa pensée.
Elle imaginait maintenant les péripéties de la
route, portraiturait des compagnons de voyage inventés
par elle, et ébauchait une aventure d’amour
avec la femme d’un capitaine d’infanterie qui allait
rejoindre son mari.
Puis, s’étant assise, elle interrogea Duroy sur la topographie
de l’Algérie, qu’elle ignorait absolument.
En dix minutes, elle en sut autant que lui, et elle fit
un petit chapitre de géographie politique et coloniale
pour mettre le lecteur au courant et le bien préparer à
comprendre les questions sérieuses qui seraient soulevées
dans les articles suivants.
Puis elle continua par une excursion dans la province
d’Oran, une excursion fantaisiste, où il était
surtout question des femmes, des Mauresques, des
Juives, des Espagnoles.
"Il n’y a que ça qui intéresse", disait-elle.
Elle termina par un séjour à Saïda, au pied des
hauts plateaux, et par une jolie petite intrigue entre
le sous-officier Georges Duroy et une ouvrière espagnole
employée à la manufacture d’alfa de Aïn-el-
Hadjar. Elle racontait les rendez-vous, la nuit, dans la
montagne pierreuse et nue, alors que les chacals, les
hyènes et les chiens arabes crient, aboient et hurlent
au milieu des rocs.
Et elle prononça d’une voix joyeuse : "La suite à demain
!" Puis, se relevant : "C’est comme ça qu’on écrit
un article,mon cher monsieur. Signez, s’il vous plaît."
Il hésitait.
"Mais signez donc !"
Alors, il se mit à rire, et écrivit au bas de la page :
"GEORGES DUROY."
Elle continuait à fumer en marchant ; et il la regardait
toujours, ne trouvant rien à dire pour la remercier,
heureux d’être près d’elle, pénétré de reconnaissance
et du bonheur sensuel de cette intimité naissante.
Il lui semblait que tout ce qui l’entourait faisait
partie d’elle, tout, jusqu’aux murs couverts de livres.
Les sièges, les meubles, l’air où flottait l’odeur du tabac
avaient quelque chose de particulier, de bon, de
doux, de charmant, qui venait d’elle.
Brusquement elle demanda :
"Qu’est-ce que vous pensez de mon amie Mme de
Marelle ?"
Il fut surpris :
"Mais... je la trouve... je la trouve très séduisante.
- N’est-ce pas ?
- Oui, certainement."
Il avait envie d’ajouter : "Mais pas autant que
vous." Il n’osa point.
Elle reprit :
"Et si vous saviez comme elle est drôle, originale,
intelligente ! C’est une bohème, par exemple, une
vraie bohème. C’est pour cela que son mari ne l’aime
guère. Il ne voit que le défaut et n’apprécie point les
qualités."
Duroy fut stupéfait d’apprendre que Mme de Marelle
était mariée. C’était bien naturel, pourtant.
Il demanda .
"Tiens... elle est mariée ? Et qu’est-ce que fait son
mari ?"
Mme Forestier haussa tout doucement les épaules
et les sourcils, d’un seul mouvement plein de significations
incompréhensibles.
"Oh ! il est inspecteur de la ligne du Nord. Il passe
huit jours par mois à Paris. Ce que sa femme appelle
" le service obligatoire", ou encore " la corvée de semaine",
ou encore " la semaine sainte ". Quand vous
la connaîtrez mieux, vous verrez comme elle est fine
et gentille. Allez donc la voir un de ces jours."
Duroy ne pensait plus à partir ; il lui semblait qu’il
allait rester toujours, qu’il était chez lui.
Mais la porte s’ouvrit sans bruit, et un grand monsieur
s’avança, qu’on n’avait point annoncé.
Il s’arrêta en voyant un homme. Mme Forestier parut
gênée une seconde, puis elle dit, de sa voix naturelle,
bien qu’un peu de rose lui fûtmonté des épaules
au visage :
"Mais entrez donc, mon cher. Je vous présente un
bon camarade de Charles,M.GeorgesDuroy, un futur
journaliste."
Puis, sur un ton différent, elle annonça :
"Le meilleur et le plus intime de nos amis, le comte
de Vaudrec."
Les deux hommes se saluèrent en se regardant au
fond des yeux, et Duroy tout aussitôt se retira.
On ne le retint pas. Il balbutia quelques remerciements,
serra la main tendue de la jeune femme, s’inclina
encore devant le nouveau venu, qui gardait un
visage froid et sérieux d’homme du monde, et il sortit
tout à fait troublé, comme s’il venait de commettre
une sottise.
En se retrouvant dans la rue, il se sentit triste, mal
à l’aise, obsédé par l’obscure sensation d’un chagrin
voilé. Il allait devant lui, se demandant pourquoi
cette mélancolie subite lui était venue ; il ne trouvait
point, mais la figure sévère du comte de Vaudrec, un
peu vieux déjà, avec des cheveux gris, l’air tranquille
et insolent d’un particulier très riche et sûr de lui, revenait
sans cesse dans son souvenir.
Et il s’aperçut que l’arrivée de cet inconnu, brisant
un tête-à-tête charmant où son coeur s’accoutumait
déjà, avait fait passer en lui cette impression de froid
et de désespérance qu’une parole entendue, une misère
entrevue, les moindres choses parfois suffisent à
nous donner.
Et il lui semblait aussi que cet homme, sans qu’il
devinât pourquoi, avait été mécontent de le trouver
là.
Il n’avait plus rien à faire jusqu’à trois heures ; et
il n’était pas encore midi. Il lui restait en poche six
francs cinquante : il alla déjeuner au bouillon Duval.
Puis il rôda sur le boulevard ; et comme trois heures
sonnaient, il monta l’escalier-réclame de La Vie Française.
Les garçons de bureau, assis sur une banquette,
les bras croisés, attendaient, tandis que, derrière une
sorte de petite chaire de professeur, un huissier classait
la correspondance qui venait d’arriver. La mise
en scène était parfaite, pour en imposer aux visiteurs.
Tout le monde avait de la tenue, de l’allure, de
la dignité, du chic, comme il convenait dans l’antichambre
d’un grand journal.
Duroy demanda :
"M.Walter, s’il vous plaît ?"
L’huissier répondit :
"M. le directeur est en conférence. Si monsieur
veut bien s’asseoir un peu."
Et il indiqua le salon d’attente, déjà plein de
monde.
On voyait là des hommes graves, décorés, importants,
et deshommes négligés, au linge invisible, dont
la redingote, fermée jusqu’au col, portait sur la poitrine
des dessins de taches rappelant les découpures
des continents et des mers sur les cartes de géographie.
Trois femmes étaient mêlées à ces gens. Une
d’elles était jolie, souriante, parée, et avait l’air d’une
cocotte ; sa voisine, au masque tragique, ridée, parée
aussi d’une façon sévère, portait ce quelque chose de
fripé, d’artificiel qu’ont, en général, les anciennes actrices,
une sorte de fausse jeunesse éventée, comme
un parfum d’amour ranci.
La troisième femme, en deuil, se tenait dans un
coin, avec une allure de veuve désolée. Duroy pensa
qu’elle venait demander l’aumône.
Cependant on ne faisait entrer personne, et plus de
vingt minutes s’étaient écoulées.
Alors Duroy eut une idée, et, retournant trouver
l’huissier :
"M. Walter m’a donné rendez-vous à trois heures,
dit-il. En tout cas, voyez si mon amiM. Forestier n’est
pas ici."
Alors on le fit passer par un long corridor qui
l’amena dans une grande salle où quatre messieurs
écrivaient autour d’une large table verte.
Forestier, debout devant la cheminée, fumait une
cigarette en jouant au bilboquet. Il était très adroit à
ce jeu et piquait à tous coups la bille énorme en buis
jaune sur la petite pointe de bois. Il comptait : "Vingtdeux,
- vingt-trois, - vingt-quatre, - vingt-cinq."
Duroy prononça : "Vingt-six." Et son ami leva les
yeux, sans arrêter lemouvement régulier de son bras.
"Tiens, te voilà ! - Hier, j’ai fait cinquante-sept
coups de suite. Il n’y a que Saint-Potin qui soit plus
fort que moi ici. As-tu vu le patron ? Il n’y a rien de
plus drôle que de regarder cette vieille bedole deNorbert
jouer au bilboquet. Il ouvre la bouche comme
pour avaler la boule."
Un des rédacteurs tourna la tête vers lui :
"Dis donc, Forestier, j’en connais un à vendre, un
superbe, en bois des Iles. Il a appartenu à la reine
d’Espagne, à ce qu’on dit. On en réclame soixante
francs. Ça n’est pas cher."
Forestier demanda : "Où loge-t-il ?" Et comme il
avait manqué son trente-septième coup, il ouvrit une
armoire où Duroy aperçut une vingtaine de bilboquets
superbes, rangés et numérotés comme des bibelots
dans une collection. Puis ayant posé son instrument
à sa place ordinaire, il répéta :
"Où loge-t-il, ce joyau ?"
Le journaliste répondit :
"Chez un marchand de billets du Vaudeville. Je
t’apporterai la chose demain, si tu veux.
- Oui, c’est entendu. S’il est vraiment beau, je le
prends, on n’a jamais trop de bilboquets."
Puis se tournant vers Duroy :
"Viens avec moi, je vais t’introduire chez le patron,
sans quoi tu pourrais moisir jusqu’à sept heures du
soir."
Ils retraversèrent le salon d’attente, où les mêmes
personnes demeuraient dans le même ordre. Dès que
Forestier parut, la jeune femme et la vieille actrice, se
levant vivement, vinrent à lui.
Il les emmena, l’une après l’autre, dans l’embrasure
de la fenêtre, et, bien qu’ils prissent soin de causer
à voix basse, Duroy remarqua qu’il les tutoyait
l’une et l’autre.
Puis, ayant poussé deux portes capitonnées, ils pénétrèrent
chez le directeur.
La conférence, qui durait depuis une heure, était
une partie d’écarté avec quelques-uns de ces messieurs
à chapeaux plats que Duroy avait remarqués la
veille.
M.Walter tenait les cartes et jouait avec une attention
concentrée et des mouvements cauteleux, tandis
que son adversaire abattait, relevait, maniait les légers
cartons coloriés avec une souplesse, une adresse
et une grâce de joueur exercé. Norbert de Varenne
écrivait un article, assis dans le fauteuil directorial, et
Jacques Rival, étendu tout au long sur un divan, fumait
un cigare, les yeux fermés.
On sentait là-dedans le renfermé, le cuir des
meubles, le vieux tabac et l’imprimerie ; on sentait
cette odeur particulière des salles de rédaction que
connaissent tous les journalistes.
Sur la table en bois noir aux incrustations de
cuivre, un incroyable amas de papier gisait : lettres,
cartes, journaux, revues, notes de fournisseurs, imprimés
de toute espèce.
Forestier serra les mains des parieurs debout derrière
les joueurs, et sans dire un mot regarda la partie ;
puis, dès que le pèreWalter eut gagné, il présenta :
"Voici mon ami Duroy."
Le directeur considéra brusquement le jeune
homme de son coup d’oeil glissé par-dessus le verre
des lunettes, puis il demanda :
"M’apportez-vous mon article ? Ça irait très bien
aujourd’hui, en même temps que la discussion Morel."
Duroy tira de sa poche les feuilles de papier pliées
en quatre :
"Voici, monsieur."
Le patron parut ravi, et, souriant :
"Très bien, très bien. Vous êtes de parole. Il faudra
me revoir ça, Forestier ?"
Mais Forestier s’empressa de répondre :
"Ce n’est pas la peine, monsieur Walter : j’ai fait la
chronique avec lui pour lui apprendre le métier. Elle
est très bonne."
Et le directeur qui recevait à présent les cartes données
par un grand monsieur maigre, un député du
centre gauche, ajouta avec indifférence : "C’est parfait,
alors." Forestier ne le laissa pas commencer sa
nouvelle partie ; et, se baissant vers son oreille : "Vous
savez que vous m’avez promis d’engager Duroy pour
remplacer Marambot. Voulez-vous que je le retienne
aux mêmes conditions ?
- Oui, parfaitement."
Et prenant le bras de son ami, le journaliste l’entraîna
pendant que M.Walter se remettait à jouer.
Norbert de Varenne n’avait pas levé la tête, il semblait
n’avoir pas vu ou reconnu Duroy. Jacques Rival,
au contraire, lui avait serré la main avec une énergie
démonstrative et voulue de bon camarade sur qui on
peut compter en cas d’affaire.
Ils retraversèrent le salon d’attente, et comme tout
le monde levait les yeux, Forestier dit à la plus
jeune des femmes, assez haut pour être entendu des
autres patients : "Le directeur va vous recevoir tout à
l’heure. Il est en conférence en ce moment avec deux
membres de la commission du budget."
Puis il passa vivement, d’un air important et
pressé, comme s’il allait rédiger aussitôt une dépêche
de la plus extrême gravité.
Dès qu’ils furent rentrés dans la salle de rédaction,
Forestier retourna prendre immédiatement son bilboquet,
et, tout en se remettant à jouer et en coupant
ses phrases pour compter les coups, il dit à Duroy :
"Voilà. Tu viendras ici tous les jours à trois heures
et je te dirai les courses et les visites qu’il faudra faire,
soit dans le jour, soit dans la soirée, soit dans la matinée.
- Un, - je vais te donner d’abord une lettre
d’introduction pour le chef du premier bureau de la
préfecture de police, - deux, - qui te mettra en rapport
avec un de ses employés. Et tu t’arrangeras avec
lui pour toutes les nouvelles importantes - trois -
du service de la préfecture, les nouvelles officielles
et quasi officielles, bien entendu. Pour tout le détail,
tu t’adresseras à Saint-Potin, qui est au courant,
- quatre, - tu le verras tout à l’heure ou demain. Il
faudra surtout t’accoutumer à tirer les vers du nez
des gens que je t’enverrai voir, - cinq, - et à pénétrer
partout malgré les portes fermées, - six. - Tu toucheras
pour cela deux cents francs par mois de fixe, plus
deux sous la ligne pour les échos intéressants de ton
cru, - sept, - plus deux sous la ligne également pour
les articles qu’on te commandera sur des sujets divers,
- huit."
Puis il ne fit plus attention qu’à son jeu, et il continua
à compter lentement, - neuf, - dix, - onze, -
douze, - treize. - Il manqua le quatorzième, et, jurant :
"Nom de Dieu de treize ! il me porte toujours la
guigne, ce bougre-là. Je mourrai un treize certainement."
Un des rédacteurs qui avait fini sa besogne prit
à son tour un bilboquet dans l’armoire ; c’était un
tout petit homme qui avait l’air d’un enfant, bien
qu’il fût âgé de trente-cinq ans ; et plusieurs autres
journalistes étant entrés, ils allèrent l’un après l’autre
chercher le joujou qui leur appartenait. Bientôt ils
furent six, côte à côte, le dos au mur, qui lançaient
en l’air, d’un mouvement pareil et régulier, les boules
rouges, jaunes ou noires, suivant la nature du bois. Et
une lutte s’étant établie, les deux rédacteurs qui travaillaient
encore se levèrent pour juger les coups.
Forestier gagna de onze points. Alors le petit
homme à l’air enfantin, qui avait perdu, sonna le garçon
de bureau et commanda : "Neuf bocks. " Et ils se
remirent à jouer en attendant les rafraîchissements.
Duroy but un verre de bière avec ses nouveaux
confrères, puis il demanda à son ami :
"Que faut-il que je fasse ?" L’autre répondit : "Je n’ai
rien pour toi aujourd’hui. Tu peux t’en aller si tu veux.
- Et... notre... notre article... est-ce ce soir qu’il passera
?
- Oui, mais ne t’en occupe pas : je corrigerai les
épreuves. Fais la suite pour demain, et viens ici à trois
heures, comme aujourd’hui."
Et Duroy, ayant serré toutes les mains sans savoir
même le nomde leurs possesseurs, redescendit le bel
escalier, le coeur joyeux et l’esprit allègre.

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